Législation

Les réformes de la CSU sont généralement établies par la législation nationale. La société civile a un rôle essentiel à jouer dans le suivi de l’élaboration, de l’application et de l’impact des lois sur la CSU. Cela est plus facile à faire lorsque cette législation est fondée sur les droits et inclusive, avec des mécanismes permettant d’aborder les questions de politique et de droits humains, ainsi que des financements pour que les communautés puissent mener des actions de plaidoyer et défense des droits. En Thaïlande, un mouvement citoyen a permis d’inclure dans la loi sur la sécurité sanitaire nationale de 2002 des dispositions clés sur la responsabilité et la représentation (pour en savoir plus, cliquezici [en anglais]).

Dans de nombreux pays, des obstacles juridiques empêchent de nombreuses OSC de fournir des services de santé. La législation relative à la CSU doit donc également soutenir la prestation de services communautaires, également connue sous le nom de « contrats de services sociaux ». Avant tout, la législation relative à la CSU doit répondre aux besoins des plus pauvres et des plus vulnérables. Au Ghana, Planned Parenthood Association a fait pression avec succès pour que la contraception gratuite soit incluse dans la loi sur l’assurance nationale (en savoir plusici [en anglais]).

Lorsque la législation en matière de santé est défavorable, la société civile peut demander une réforme et même s’engager dans un litige stratégique. En 2011, le Center for Health, Human Rights and Development (Centre pour la santé, les droits de l’homme et le développement) en Ouganda a intenté une action en justice contre le gouvernement en raison des décès évitables de femmes en couches dus à la mauvaise qualité des services de santé (en savoir plusici [en anglais]).

Planification et définition des priorités

Chaque pays doit établir un plan national de santé basé sur les priorités nationales en matière de santé. Pour alimenter une base de données probantes, la société civile peut fournir des données actualisées au niveau communautaire et des idées provenant du « front », qui sont souvent négligées. Un exemple important de recherche participative est l’Indice de stigmatisation des personnes vivant avec le VIH, une initiative du Réseau mondial des personnes vivant avec le VIH (GNP+). Élaboré par la communauté, cet outil de recherche normalisé recueille des données sur l’impact de la stigmatisation et de la discrimination sur la vie des personnes vivant avec le VIH. Un autre exemple est le Key Population Consortium au Kenya, qui fait entendre la voix de certaines des personnes les plus marginalisées de la société dans la définition des priorités de la politique de santé (en savoir plusici [en anglais]).

La participation réelle de la société civile dans la planification opérationnelle de la CSU garantit que les plans sont appropriés, réalisables et légitimes. Cela signifie qu’ils sont plus susceptibles de bénéficier de la confiance de la société dans son ensemble. Plusieurs pays, comme le Botswana, œuvrent dans ce sens en créant des groupes de travail techniques multipartites sur des sujets cruciaux en matière de CSU.

Les réseaux nationaux d’OSC de santé peuvent être d’excellentes plateformes d’influence, car ils rassemblent un large éventail de compétences et d’expériences. Le réseau national des OSC de santé au Myanmar participe au cadre de responsabilité sociale qui surveille la mise en œuvre de la stratégie nationale de santé et fournit une expertise spécifique sur l’intégration des services de santé (en savoir plusici [en anglais]). Au Kenya, le réseau d’ONG de santé HENNET est membre du groupe consultatif national sur les prestations de santé depuis 2018.

En Afrique de l’Ouest, des mesures positives ont été prises pour que les citoyens s’approprient les réformes de la santé et leur fassent confiance aux niveaux national et régional. Par exemple, au Sénégal, la société civile apporte une contribution directe aux examens régionaux du secteur de la santé, tandis qu’au Burkina Faso, les ONG ont directement influencé la stratégie nationale de financement de la santé.

Enfin, une fois que les OSC traditionnelles ont obtenu un siège à la table de planification, elles sont chargées de faire pression pour des processus politiques totalement inclusifs, en veillant à ce que les voix et les opinions des groupes sous-représentés, tels que les adolescents et les jeunes, soient prises en compte dans la planification des politiques. La campagne Ready for UHC [en anglais] menée par le Réseau mondial des jeunes vivant avec le VIH est un excellent exemple d’un mouvement de jeunes faisant pression pour leur inclusion au niveau national.

Budgétisation

En tant que partie prenante essentielle, l’implication de la société civile dans la bonne gouvernance est cruciale lorsqu’il s’agit du financement de la santé. Cela est nécessaire pour garantir la transparence, l’optimisation des ressources et la reddition de comptes, bien que ce soit un domaine dans lequel très peu d’OSC se sentent à l’aise.

Les budgets sont des outils essentiels de politique publique – ils communiquent les priorités et les stratégies du gouvernement et sont la façon dont les gouvernements tiennent leurs promesses. De bonnes politiques et de bons plans ne suffisent pas ; ils doivent être soutenus par des budgets appropriés et efficaces.

La société civile peut – et doit – s’engager dans le plaidoyer budgétaire à chaque étape du cycle budgétaire, qu’il s’agisse de participer aux processus nationaux et locaux d’établissement du budget, de vérifier la justification des dépenses de santé (voir l’exemple du Burkina Faso) et de vérifier de manière indépendante les prix des médicaments, ou d’analyser les budgets et les dépenses du point de vue des groupes mal desservis.

En Indonésie, par exemple, le Forum pour la transparence budgétaire (Seknas FITRA [en anglais]) plaide pour une budgétisation transparente, favorable aux pauvres et sensible au genre, en coopération avec la société civile locale et le ministère des Finances. En 2014, son analyse de la mise en œuvre régionale du système national de sécurité sociale indonésien de 2004 a éclairé le Régime national d’assurance maladie.

Les réseaux communautaires peuvent jouer un rôle essentiel dans le suivi des dépenses réelles au niveau des établissements de santé locaux et des équipes sanitaires de district. En République démocratique du Congo, le Projet de budget participatif a permis aux citoyens des zones rurales et urbaines de participer à la formulation et à la gestion des budgets locaux, renforçant par la même occasion la gouvernance sanitaire.

 

 

Suivi et évaluation
Outre le suivi budgétaire, la communauté a un rôle essentiel à jouer dans le suivi des performances des politiques et programmes de soins de santé primaires universels, y compris des initiatives pilotes. Les mécanismes de redevabilité, dirigés par la communauté à tous les niveaux de mise en œuvre sont connus pour améliorer l’accessibilité, la réactivité et la qualité des services (voir, par exemple, PEPFAR [en anglais]). L’Observatoire régional des traitements communautaires en Afrique de l’Ouest (RCTO-WA), dirigé par l’ITPC, donne aux réseaux de personnes vivant avec le VIH dans 11 pays les moyens de collecter et d’analyser des données qualitatives et quantitatives sur les obstacles aux services liés au VIH afin d’améliorer l’accès au traitement. En Ouganda, le Groupe d’action pour la santé, les droits de l’homme et le VIH [en anglais] se concentre sur l’amélioration de la qualité des systèmes de santé à travers le prisme des droits de l’homme. Au niveau mondial, des groupes communautaires soumettent des rapports parallèles au Comité des droits des personnes handicapées (CRDP) à afin que les personnes en situation de handicap et leurs représentants surveillent la mise en œuvre des droits des personnes en situation de handicap dans leur pays.

La prochaine Réunion de haut niveau des Nations Unies sur les soins de santé universels (2023) sera un moment crucial pour la société civile, qui présentera des données et des preuves sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre des soins de santé universels, en veillant à ce que les données soient entièrement désagrégées pour identifier les personnes laissées pour compte. En attendant, les Examens nationaux volontaires et les rapports parallèles sont un moyen essentiel de participer au niveau des Nations Unies, tandis qu’au niveau national, les communautés peuvent participer aux processus d’évaluation conjointe des stratégies nationales de santé.

Plaidoyer et mobilisation communautaire

Le plaidoyer en faveur de la CSU comporte de nombreuses facettes, allant de l’approbation du concept de la CSU et de la promotion d’un véritable accès universel à la santé pour tous à la demande d’une augmentation des budgets de la santé et à l’obligation pour les gouvernements de rendre compte de leurs promesses. Trop souvent, le concept de CSU est considéré comme un concept technique et abstrait et non comme un mouvement de base.

Pourtant, la CSU est avant tout une cause politique. C’est pourquoi il ne faut pas négliger de mobiliser les citoyens pour qu’ils utilisent le pouvoir de leur vote aux urnes. Sensibiliser le grand public à la responsabilité du gouvernement dans ce domaine après des décennies de négligence des dépenses de santé doit être une composante essentielle de l’action de la société civile dans ce domaine. Cet objectif peut être atteint grâce à de larges coalitions de mouvements divers dans de nombreux secteurs sociaux.

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